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lundi 18 août 2014

Citations de Si Je Reste de Gayle Forman


Citations à ne pas lire si vous n'avez pas lu le livre. J'ai mis ici toutes les citations qui m'ont plus dans ce livre et donc des citations qui peuvent révéler le dénouement de cette histoire.

Mon père tapote sa pipe. Il est dans sa période années 1950 et fumer la pipe en fait partie, avec le port du noeud papillon. Je ne sais si c'est une façon de montrer qu'il est rentré dans le rang, en tant qu'ancien punk, ou s'il s'est vraiment assagi en devenant professeur d'anglais. Toujours est-il que j'adore l'odeur de son tabac, un arôme à la fois doux et épicé, qui me rappelle l'hiver et les feux de bois.
(7h09)

J'ai conscience de leurs prières et cela m'incite à penser que je pourrais bien être morte. Sans compter que mon corps est complètement insensible, alors qu'à voir ma jambe ouverte jusqu'à l'os, je devrais avoir horriblement mal, et que je ne pleure pas, même si je sais que quelque chose d'impensable vient d'arriver à ma famille.
(9h23)

"Que se passe-t-il, ma Mia à moi? m'a-t-il demandé en s'asseyant sur les marches à mes côtés.
- Je n'y arriverai pas.
- Ce serait vraiment dommage. J'ai un super cadeau pour toi, après le récital. Mieux que des fleurs.
- Donne-le à quelqu'un d'autre. Je ne peux pas. Je ne suis pas comme toi ou maman, ni même comme Teddy."
Teddy avait tout juste six mois à l'époque, mais on devinait déjà une personnalité plus forte que la mienne.
"Ca c'est vrai que lorsque Teddy nous a donné son premier récital d'instrument à vent, il était très décontracté!"
J'ai souri à travers mes larmes, tandis que papa m'entourait les épaules de son bras.
"Tu sais, Mia, moi aussi j'avais le trac."
Je l'ai regardé, incrédule. Mon père avait toujours eu l'air si sûr de lui!
"Tu dis ça pour me faire plaisir.
- Mais non. C'était épouvantable.
- Alors, comment tu faisais?
- Il descendait quelques demis de bière avant le concert, Mia."
Maman venait de nous rejoindre. Vêtue d'une minijupe en vinyle noir et d'un petit haut rouge, elle portait Teddy qui bavait d'un air béat dans son porte-bébé.
"Je ne te conseille pas de l'imiter, a-t-elle poursuivi.
- C'est plus sage à ton âge, en effet, a déclaré mon père en riant. En plus, moi, quand je vomissais sur la scène, c'était punk. Imagine la réaction du public si tu faisais pareil en concert classique!"
(9h23)


"Les billets, tu en les as pas eus par un ami de la famille, n'est-ce pas?" ai-je demandé.
JE me suis dit qu'il allait rire ou lever les bras en faisant semblant de se rendre, attitude qu'il adoptait lorsque j'avais le dernier avec lui. Mais il a hoché négativement la tête en plongeant son regard gris-vert-brun dans le mien.
"Je les ai payés en livrant des pizzas pendant quinze jours", a-t-il reconnu.
Je me suis arrêtée net. En dessous de nous, l'eau clapotait.
"Pourquoi, Adam, pourquoi moi?
- Je ne connais personne qui soit aussi passionné de musique de toi. C'est pourquoi j'aime te voir t'exercer. Tu as une façon ravissante de plisser le front. Là."
Il a posé le doigt entre mes sourcils.
"Moi, la musique m'obsède et pourtant, elle ne réussit pas à me transporter de la même manière.
- Alors, je suis pour toi une expérimentation sociale, en quelque sorte?"
Je voulais faire de l'humour, mais c'était raté.
"Certainement pas." Sa voix était rauque, un peu étouffée. J'ai senti que je rougissais jusqu'aux oreilles et j'ai contemplé mes chaussures. Si je levais les yeux, il allait m'embrasser, j'en étais certaine. Et soudain, je me suis rendu compte que j'avais une envie folle qu'il m'embrasse. J'avais imaginé si souvent ce baiser que je connaissais par coeur la forme de ses lèvres. Combien de fois avais-je rêvé de caresser la fossette qu'il avait sur le menton?
J'ai levé les yeux.
C'est ainsi que tout a commencé.
(10h12)

Entre Adam et moi, ce na n'a pas été sans mal, au début. Sans doute étais-je persuadée que l'amour triomphe de tous les obstacles. Et quand il m'a raccompagnée, après le concert de Yo-Yo Ma, je crois que nous étions tous les deux conscients de tomber amoureux. C'est-à-dire qu'à mes yeux, les difficultés étaient derrière nous. Les films et les romans se terminent généralement quand le couple échange son premier baiser. On suppose qu'après, ils sont heureux.
(15h47)

"N'ayez aucun doute, elle vous entend, dit-elle. Elle se rend compte de tout ce qui se passe."
Elle reste là, les mains sur les hanches. Pour un peu, elle ferait une bulle de chewing-gum. Mon grand-père et ma grand-mère boivent ses paroles.
"Vous croyez que tout dépend des médecins, ou des infirmières, ou de cet équipement? poursuit-elle en tendant la main vers le mur d'appareils médicaux. Eh bien, non. C'est elle qui mène le jeu. Alors, parlez-lui. Dites-lui qu'elle peut prendre tout le temps qu'elle veut, mais qu'elle revienne. Vous l'attendez."
(16h47)

A les entendre, ni l'un ni l'autre n'était prêt à devenir parent. Ils ne se sentaient pas vraiment adultes. Mais il n'était pas question de refuser que je vienne au monde. Maman a toujours fait face à ses choix. Et, dans ce cas, elle a fait le choix de me garder.
Papa était plus hésitant. Plus effrayé. Jusqu'à ce que l'accoucheur me sorte du ventre maternel. Là, il s'est mis à pleurer.
"Mais non!" protestait-il lorsque maman évoquait la scène. Ma mère prenait un air amusé: "Ah bon, parce que tu n'as pas pleuré?
- Ce sont les bébés qui pleurent, disait-il en m'adressant un clin d'oeil. Moi, j'ai versé une larme. Nuance!"
(16h47)

C'est elle qui mène le jeu. Et soudain, je comprends le véritable sens de la question de mon grand-père. Car lui aussi a entendu la phrase prononcée par l'infirmière.
Si je reste. Si je vis. C'est moi qui décide.
Cela ne dépend pas des médecins. Leurs histoires de coma artificiel, c'est du bla-bla. Cela ne dépend pas non plus des anges, qui brillent par leur absence. Ce ne dépend même pas de Dieu qui, s'il existe, ne se montre pas en ce moment. Mais de moi.
Comment suis-je censée prendre ma décision? Comment puis-je rester, sans papa et sans maman? Comment puis-je m'en aller en laissant Teddy? Et Adam? C'est trop pour moi. Je ne comprends même pas comment tout cela fonctionne, pourquoi je suis ici dans cet état et comment je pourrais en sortir si je le voulais. Si je disais: "Je veux me réveiller", est-ce que je me réveillerais maintenant? J'ai déjà essayé de retrouver Teddy et de me transporter à la plage en claquant des doigts et ça n'a pas marché. Or c'était beaucoup moins compliqué.
Pourtant, je suis persuadée qu'il y a du vrai dans l'affirmation de l'infirmière. C'est moi qui mène le jeu. Tout le monde est aux petits soins pour moi.
C'est moi qui décide, je le sais maintenant.
Et cette certitude me terrifie encore plus que tout ce qui est arrivé aujourd'hui.
(17h40)

J'ai trouvé la réponse après avoir joué pendant une dizaine de minutes. Mon aversion pour les concerts n'avait rien à voir avec la jalousie, ni avec la musique ou les fans. Elle était liée aux doutes. Les mêmes doutes que m'avait toujours inspirés mon sentiment d'être le vilain petit canard. Je me sentais étrangère dans ma famille et maintenant je me sentais étrangère dans l'entourage d'Adam. Sauf qu'Adam m'avait choisie, au contraire de ma famille. Et ça, je n'arrivais pas à le comprendre. Pourquoi lui avais-je plu, moi? C'était absurde. Je savais que la musique était à l'origine de notre rencontre, en nous réunissant dans un même lieu où nous avions pu faire connaissance. Je savais aussi qu'Adam appréciait ma passion pour la musique. Et qu'il comprenait mon sens de l'humour, un humour "si noir qu'on passerait presque à côté", disait-il. Je savais qu'il avait un faible pour les brunes, parce que ses précédentes petites amies l'étaient toutes. Et enfin je savais que lorsque nous étions seuls, nous pouvions parler pendant des heures, ou bien lire côte à côte, chacun relié à son iPod, en se sentant proche de l'autre. Tout cela, ma tête le comprenait parfaitement, mais mon coeur n'y croyait pas. Quand j'étais avec Adam, j'avais l'impression d'avoir été choisie en particulier, et cela ne faisait que me pousser un peu plus à me demander pourquoi moi.
(17h40)

"Alors, est-ce que je te plais comme ça? ai-je demandé.
- Hummm.
- Ca veut dire oui ou ça veut dire non?
- Ce qui m' a plu, c'est que tu sois restée à la soirée. Complètement relax avec notre bande de sauvages. Le top du top, ça a été de danser avec toi.
- Oui, mais est-ce que je te plais plus comme ça?
- Plus que quoi?"
Sa perplexité n'était pas feinte.
"Que d'habitude."
Je commençais à m'énerver. Cette nuit, je m'étais sentie impudente, comme si mon déguisement de Halloween m'avait permis d'endosser une autre personnalité, plus proche d'Adam et de ma famille. J'essayais de le lui expliquer et, malgré moi, j'en avais les larmes aux yeux.
Adam s'est aperçu de mon désarroi. Il a garé la voiture sur une petite route et s'est tourné vers moi. "Mia, c'est ta personne que j'aime, a-t-il dit en caressant une mèche qui s'échappait de ma perruque. D'accord, tu t'es habillée plus sexy, tu es blonde et c'est différent. Mais celle que tu es cette nuit est la même dont j'étais amoureux hier et la même dont je serai amoureux demain. Je t'aime fragile et dure, cool et casse-pieds. Tu es l'une des filles les plus punks que je connaisse et ça n'a rien à voir avec la musique que tu écoutes ni avec ta façon de t'habiller."
Par la suite, à chaque fois que j'ai eu un doute sur les sentiments d'Adam, j'ai pensé à ma perruque, qui prenait la poussière dans mon placard, et je me suis souvenue de cette nuit. Et la certitude d'avoir de la chance, beaucoup de chance, a remplacé mes incertitudes.
(17h40)

Grâce à Kim, Adam est enfin ici.
Toute la journée, j'ai imaginé son arrivée. Je me suis vue en train de me précipiter pour l'accueillir, même s'il ne peut pas me voir et si la situation ne ressemble apparemment pas au film Ghost, où l'on peut passer à travers les gens qu'on aime afin qu'ils sentent votre présence.
Mais maintenant qu'Adam est là, je suis paralysée. J'ai peur de le voir. De voir son visage. Devant moi, il a pleuré à deux reprises. La première, c'était quand nous regardions La vie est belle, un vieux film émouvant de Frank Capra. La seconde, c'était à la gare de Seattle, quand une mère a réprimandé et frappé son fils trisomique sous nos yeux. Il n'a rien dit sur le moment, mais un peu plus tard j'ai vu les larmes qui coulaient sur ses joues. Et cela m'a fendu le coeur. S'il pleure, je vais en mourir. Ce ne sera pas une question de choix. Ca me tuera.
(19h13)

Même si Mr Dunlap n'est que très légèrement touché, je ne dirais pas qu'il s'en sort "bien". J'imagine ce que ça a été pour cet homme, quand il a pris sa camionnette mardi matin, mettons, pour aller travailler, et qu'il lui est arrivé cet accident. Qu'il soit père de famille ou célibataire, heureux, ou malheureux, il n'est désormais plus le même. Sa vie a irrévocablement changé. Si ma tante dit vrai, s'il n'est pas responsable de l'accident, il est simplement ce que Kim appellerait un pauvre "schmuck", le type qui se trouve au mauvais endroit au mauvais moment. Et parce qu'il n'a pas de chance et qu'il roulait ce matin-là sur la route 27, il y a maintenant deux orphelins, dont l'un au moins dans un état grave.
Comment vivre avec ça?
(19h13)

Adam l'a entendue. Il évite les infirmières et s'avance dans ma direction. Et soudain il est au pied de mon lit, la main tendue. Il va me toucher. Je pense à notre premier baiser après le concert de Yo-Yo Ma. Jusqu'à ce moment-là, je n'avais pas senti à quel point je désirais le contact de ses lèvres sur les miennes. C'est pareil maintenant. Je me rends compte que je mourais d'envie de sentir ses mains sur moi.
(19h13)

Elle exagérait. Teddy ne me prenait pas vraiment pour sa mère. Néanmoins, il y avait certaines choses que j'étais la seule à pouvoir faire pour lui. Dans les premiers temps, lorsqu'il s'agitait la nuit, il ne se calmait que si je lui jouais une berceuse au violoncelle. Quand il a commencé à s'intéresser à Harry Potter, moi seule avais le droit de lui lire un chapitre le soir au coucher. Et s'il s'écorchait un genou ou se cognait la tête, il cessait de pleurer lorsque je déposais un baiser magique sur le bobo.
Aujourd'hui, je le crains, aucun baiser magique au monde n'aurait pu quelque chose pour lui. Pourtant, je sacrifierais n'importe quoi pour avoir été en mesure de lui en donner un.
(19h13)

Je cherche Teddy, même si je sais que je ne vais pas le trouver. Je ne peux pas m'en empêcher.
Je le revois avec ses boucles blondes. J'ai toujours aimé enfouir mon visage dans ses cheveux. J'attendais le jour où il m'enverrait balader avec un "tu m'embêtes!", la formule qu'il utilisait quand papa réagissait trop bruyamment devant un match de base-ball à la télé. Mais il ne l'a encore jamais fait. Et maintenant, il ne le fera jamais.
Je m'imagine en train de le câliner ainsi une dernière fois, tandis que mes larmes mouillent ses jolies boucles et les changent en petites mèches raides.
Teddy ne passera jamais du T-ball au base-ball. Il n'aura jamais de barbe sur les joues. Jamais il ne se bagarrera, ne donnera un premier baiser, ne couchera avec une fille, ne tombera amoureux. Jamais il ne se mariera ni n'aura des enfants à la tête bouclée. Je suis son aînée de dix ans seulement, mais j'ai l'impression d'avoir vécu beaucoup plus que lui. Ce n'est pas juste. Si l'un de nous avait dû survivre, c'est lui.
(22h40)

Maintenant, je commence à comprendre. Enfin, pas complètement. Ce n'est pas comme si j'avais décidé, d'une manière ou d'une autre, qu'un vaisseau sanguin allait éclater et se répandre dans mon estomac. Ce n'est pas comme si j'avais souhaité une autre opération. Mais Teddy n'est plus là. Papa et maman ne sont plus là. Je suis montée ce matin en voiture avec ma famille et me voilà plus seule que jamais. J'ai dix-sept ans. Ce n'est pas ainsi que cela devrait être. Ce n'est pas cette tournure que ma vie devrait prendre.
Installée dans un coin tranquille, je me mets à réfléchir aux choses douloureuses que j'ai préféré ignorer jusqu'à maintenant. Que se passera-t-il si je reste? A quoi cela va-t-il ressembler de me réveiller orpheline? De ne plus sentir la fumée de la pipe de papa? De plus bavarder tranquillement avec maman en l'aidant à faire la vaisselle? De ne plus jamais lire un chapitre d'Harry Potter à Teddy? Que sera ma vie si je reste, mais sans eux?
Je ne suis pas certaine que cet univers-là soit encore le mien. Je ne suis pas certaine de vouloir me réveiller.
(22h40)

Je me rends compte maintenant que c'est facile de mourir. C'est vivre qui est difficile.
(2h48)

Je reviens brutalement à la réalité et le semblant d'apaisement apporté par la voix de mamie disparaît. C'est encore vague dans ma tête, mais je sais qu'une fois prise la décision de quitter ce monde, je partirai. Sauf que je n'y suis pas prête. Pas encore. J'ignore pourquoi, mais je ne suis pas prête. Et je crains qu'en envisageant favorablement une sieste éternelle, je ne fasse se produire la choses, irrévocablement, comme lorsque étant petite, mes grands-parents m'avertissaient que si je faisais une grimace, je resterais toujours ainsi.
(2h48)

"Si tu veux partir, tu peux, chuchote-t-il à mon oreille. Tout le monde veut que tu restes et Dieu sait que c'est mon voeu le plus cher."
Sa voix se brise. Il se racle la gorge, prend une profonde inspiration, puis reprend:
"Mais c'est ce que je veux, moi, et je sais que ce n'est pas forcément la même chose pour toi. Je tiens à te dire que si tu nous quittes, je le comprendrai. Si tu dois t'en aller, si tu préfères arrêter de te battre, tu peux, Mia."
(2h48)

"Plus on est de fous, plus on rit, a dit maman. On va faire la fiesta, comme au bon vieux temps.
Quand il y avait des dinosaures? a demandé Teddy.
Exactement, fiston. Quand il y avait des dinosaures et que ta mère et moi, nous étions jeunes."
(5h42)

"Reste", dit-il.
Sa voix se brise déjà, mais il ravale son émotion et poursuit:
"Il n'y a pas de mots pour décrire ce qui t'est arrivé. Il n'y a rien de positif là-dedans. Mais il existe une raison de vivre. Et je ne parle pas de moi. C'est seulement que... Je ne sais pas. Je dis peut-être des bêtises. Je suis en état de choc. Ce qui s'est passé pour tes parents, pour Teddy..."
Quand il prononce le prénom de mon petit frère, sa voix se brise de nouveau et les larmes inondent son visage. Et moi, je pense: Je t'aime.
Il se reprend et poursuit:
"Je suis sûr d'une chose, c'est que ce serait un gâchis si ta vie s'arrêtait là. Evidemment, ta vie est gâchée désormais, quoi qu'il arrive, et je ne suis pas assez fou pour penser que moi ou qui que ce soit pourrait changer ça. Mais je n'arrive pas à me faire à l'idée que tu ne puisses pas vieillir, avoir des enfants, suivre les cours de la Juilliard School, jouer du violoncelle devant un public nombreux qui éprouverait le même frisson que moi lorsque je te vois prendre ton archet, lorsque je te vois me sourire."
"Si tu restes, je ferai ce que tu voudras. Je quitterai la groupe pour t'accompagner à New York. Mais, si tu préfères que je m'en aille, je le ferai aussi. J'ai parlé avec Liz et elle m'a dit que ce serait peut-être trop douloureux pour toi de retrouver ta vie d'avant, qu'il vaudrait peut-être mieux que tu nous rayes de ton existence. Ce serait dur, mais je le ferais. Je peux accepter de te perdre de cette façon si je ne te perds pas aujourd'hui. Je te laisserai t'en aller. Si tu restes."
(7h46)

Il y a un éclair aveuglant, une douleur qui me déchire un bref et terrible instant, un cri s'élève en silence de mon corps brisé. Pour la première fois, j'ai la sensation de la souffrance qui m'attend si je reste.
Mais, à ce moment-là, je sens la main d'Adam. Je la sens vraiment, je sens son contact. Je ne suis plus assise sur ma chaise, pliée en deux. Je suis allongée sur le dos dans mon lit d'hôpital. Mon corps et moi ne faisions plus qu'un à nouveau.
Adam pleure et je pleure aussi, à l'intérieur, parce qu'enfin j'ai des sensations. Je sens non seulement la douleur physique, mais l'horreur et la profondeur de la perte que j'ai subie et qui va laisser en moi un cratère que rien ne pourra combler. Mais je sens aussi tout ce qui remplit ma vie, y compris ce qui a disparu et ce qu'elle me réserve et que j'ignore encore. Et c'est trop pour moi. Ces sensations s'accumulent et menacent d'exploser dans ma poitrine. Je n'ai qu'un moyen d'y survivre: me concentrer sur la main d'Adam qui serre la mienne.
(7h46)

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